En ce moment, est diffusé dans les « shorts » de YouTube la vidéo d’une jeune femme qui explique qu’elle est persécutée pour sa foi chrétienne. On voit en gros plan son visage en larmes puis on passe à une autre scène où une femme fait irruption dans sa chambre, visiblement très énervée, et lui jette quelque chose. La scène est très rapide, il est impossible de distinguer ce qui se passe réellement.
Dans la scène suivante, la voix de la jeune fille explique qu’elle trouve du réconfort dans un cadeau que lui a fait son petit ami, chrétien lui aussi, et la caméra montre un bocal de verre fermé par un bouchon de liège qui contient des petits papiers de couleurs. Le zoom sur l’étiquette nous permet de comprendre qu’il s’agit de versets bibliques et que le code couleur correspond à l’effet recherché : consolation, encouragement, etc. La jeune fille sort un papier et on peut lire le verset biblique. On nous propose alors d’acheter le bocal.
La même vidéo est diffusée mais cette fois, la voix off ne raconte pas tout à fait la même histoire. La jeune fille chrétienne est toujours persécutée mais parce qu’elle a monté sa propre affaire « chrétienne » : elle fabrique les bocaux à versets. On voit la scène où la femme entre dans la chambre, le moment de présentation du bocal, etc. Puis on nous propose d’acheter l’objet.
Il existe une troisième version de cette vidéo : la jeune fille persécutée l’est parce qu’elle s’est convertie à l’Islam et le bocal contient des sourates du Coran. Mais il est toujours possible d’acquérir l’objet… Le lien conduit vers un site commerçant hinois.
En fouillant un peu sur les sites en lien, on trouve d’autres « merveilles » : un très joli triptyque en bois sculpté qui montre la « sainte famille » et qui peut servir d’autel portatif. Le même objet existe dans une autre version : cette fois ce sont des bouddhas qui sont représentés. La République Populaire de Chine sait oublier ses convictions athéistes quand il s’agit d’utiliser la foi des autres pour gagner de l’argent…
Pendant très longtemps, jusqu’aux années 80 environ, les églises évangéliques européennes s’en sont tenues aux principes édictés par le Protestantisme et ont évité, jusqu’à l’excès, les objets d’inspiration « religieuse ». L’influence des églises nord – américaines a fait doucement mais sûrement évoluer les choses et aujourd’hui on trouve de très jolis objets d’art, ou de la vie courante qui nous permettent d’affirmer notre foi ou, simplement, de nous en réjouir et de la célébrer.
Mais à l’heure de la mondialisation, certains ont bien compris qu’il y avait là un formidable marché à conquérir et ils s’y sont engouffrés, déclinant le même concept pour l’adapter aux différentes croyances… Outre le fait que cela conduit à la création d’ « horreurs » ( comme une peluche censée représenter Jésus qui a un cœur lumineux qui bat), cela m’interroge.
Si le même objet existe en version chrétienne et en version musulmane, vers quoi va-t-on ? Si je peux acheter, sur le même site indifféremment, un bocal plein de versets ou plein de sourates, que me dit-on ? Que ma foi est interchangeable… Une sourate vaut bien un verset, Bouddha vaut bien Jésus et si, pour vendre, il faut faire croire que le bocal est fabriqué artisanalement par une jeune fille persécutée, allons-y !
L’apôtre Paul a bien failli perdre la vie parce que, suite à ses prêches et aux multiples conversions, le commerce des idoles à Ephèse avait périclité. Il semble que notre siècle sache faire preuve d’ingéniosité en adaptant ses propositions commerciales jusqu’à créer un mélange qui risque bien, j’en ai peur, de contribuer au syncrétisme que certains appellent de leurs vœux.
Prudence, prudence…
Emmanuelle K.